Pétion-Ville, 19 mai 2025 – La société haïtienne perd l’une de ses figures intellectuelles et militantes majeures : Didier Dominique. Sociologue, professeur, syndicaliste, écrivain — il fut tout cela à la fois, avec rigueur, conviction et courage.

Formé en sociologie urbaine, Didier Dominique a enseigné à l’Université d’État d’Haïti durant plusieurs décennies, marquant profondément des générations d’étudiants par son regard critique sur les dynamiques urbaines, les inégalités sociales et l’architecture de la marginalisation. Son enseignement visait plus qu’à transmettre des savoirs : il appelait à la transformation concrète d’une société injuste.

Au-delà des amphithéâtres, Didier Dominique était une voix active dans le débat public. À travers ses interventions médiatiques, il dénonçait sans relâche les logiques de domination, l’urbanisation sauvage, et la concentration du pouvoir économique. Il ne craignait pas de pointer du doigt les privilèges d’une élite indifférente au sort de la majorité.

Mais c’est peut-être dans son engagement syndical qu’il a laissé la plus profonde empreinte populaire. Leader emblématique de l’organisation Batay Ouvriye, il a lutté durant des années pour les droits des travailleurs haïtiens, dans les zones franches, dans les rues, dans les usines. Sa voix portait les cris étouffés des plus vulnérables. Son combat ne cherchait pas la visibilité, mais la justice.

Écrivain à ses heures, il co-signe avec son épouse, l’ethnologue Rachel Beauvoir, l’ouvrage Savalou E, lauréat du prix Casa de las Américas en 1989. Cette œuvre singulière croise anthropologie, architecture et spiritualité haïtienne, dévoilant les multiples visages de l’identité nationale.

La disparition de Didier Dominique laisse un vide immense. Mais son œuvre intellectuelle, son exemple de résistance et son combat sans concession continueront d’inspirer les luttes pour une Haïti plus digne, plus humaine, plus équitable.